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Dans notre société actuelle, que ce soit la télévision, les journaux ou le numérique, tous les médias ont une grande importance et jouent un rôle indispensable vis-à-vis la culture d’un peuple. Effectivement, c’est grâce à ceux-ci que chaque citoyen peut être informé de l’actualité, des enjeux, de la politique, de la science, des découvertes, du milieu culturel, de l’international, et j’en passe. Toutes ces informations sont essentielles pour créer et maintenir des citoyens instruits, responsables, autonomes et conscients, qui seront en mesure de participer et d’apporter quelque chose à la société. Dans ce sens, chaque pays démocratique se doit d’avoir un télédiffuseur public et indépendant, travaillant dans l’intérêt public et qui est garant d’objectivité et d’honnêteté. Ici, dans le pays démocratique du Canada, ce télédiffuseur se nomme Radio-Canada. Or, l’existence de cette société d’État, sensée fonctionner de façon autonome par rapport au gouvernement, est de plus en plus menacée par les coupures excessives de ce dernier.
En 2012, le budget fédéral canadien annonçait des coupes de 115 millions $ chez Radio-Canada, qui allaient engendrer la suppression de 650 emplois. En 2014, des compressions de 130 millions $ se sont ajoutés à ce montant, entraînant environ le même nombre de mises à pied. Pourtant, toutes ces coupures ne sont aucunement les premières qu’a connues Radio-Canada, depuis ses touts débuts, en 1936. Le gouvernement libéral de Jean-Chrétien avait, par exemple, diminué son budget de près de 400 millions, en 1995. Aujourd’hui, toutes ces coupures commencent à avoir raison de Radio-Canada, qui, en plus de toutes ces mises à pied, a dû réduire la durée des bulletins d’informations des stations régionales, passant de soixante minutes à trente minutes, diminuer ses productions maison, fermer de nombreux studios ainsi que le plus grand costumier en Amérique du Nord, en plus de devoir diminuer ses effectifs de 20% au cours des cinq prochaines années. Alors que le monde médiatique se tourne de plus en plus vers le numérique, que tous les télédiffuseurs investissent dans ce développement, et que la compétition est féroce, Radio-Canada se voit complètement privé d’un quelconque développement. C’est même tout le contraire que notre institution publique fait. Alors que l’heure serait à l’investissement, Radio-Canada se tourne plutôt vers le désinvestissement, qui ira, de toute évidence, vers sa perte.
Toutes ces coupures exercées à l’égard de notre télédiffuseur public sont très graves, et sont une atteinte directe et destructive à notre culture. Radio-Canada est présente dans notre société depuis de nombreuses décennies. Elle a vu plusieurs générations grandir et a permis à celles-ci de devenir de bons citoyens. Elle propose à la population une information objective de qualité, autant nationale qu’internationale, ainsi qu’une production de qualité qui est pensée et réalisée ici, par des gens d’ici. Mais, ne nous le cachons pas, toute cette qualité devient un défi insurmontable si l’on n’a pas un financement adéquat. Cette institution publique, dont le but existentiel est orienté vers la population, et non vers l’idée de rapporter de l’argent à des grosses entreprises privés qui contrôlent leur médias justement et uniquement en fonction des profits qu’ils feront, est unique et essentielle. Il faut également noter que Radio-Canada a un impact économique important autant pour Montréal que pour les régions. De plus, elle représente notre patrimoine canadien, québécois et francophone. Elle a forgé notre identité culturelle ainsi que collective. Ce télédiffuseur public indépendant est très important au sein de la communauté francophone du Canada. En effet, il représente le seul filet de communication francophone pour tous les francophones hors Québec. Ainsi, Radio-Canada leur permet de maintenir leur langue et leur culture. Et, inutile de dire qu’il est plus qu’important de protéger notre unicité, notre langue, notre culture et notre identité, cela est une évidence. Comme l’a si bien dit Gaston Miron : « J’affirme que ma différence au monde est ma culture et cette culture est un enrichissement au patrimoine universel».
Au très grand malheur de notre culture, il semble fortement que Radio-Canada est en train de creuser sa tombe. Or, ce n’est pas réellement le télédiffuseur lui-même qui agit dans ce sens. Le grand responsable de cette menace de mort prochaine est, de toute évidence, le gouvernement, le pouvoir, puisque c’est grâce à son financement que Radio-Canada peut survivre. Ainsi, voilà que l’on peut fortement remettre en doute la qualité de notre démocratie. Avec tout ce désinvestissement, l’État exprime clairement son intention de détruire cette institution publique, qu’il perçoit comme un pouvoir indépendant et critique, donc beaucoup trop hors de son contrôle. En plus, il est important de préciser que le conseil d’administration de Radio-Canada est dirigé par un président que le Parti Conservateur a lui-même nommé. Drôle de hasard vous direz, ce dernier, Hubert Lacroix, est un ex-secrétaire national du Parti Conservateur. Et ce n’est pas tout, pour la première fois de toute l’histoire de Radio-Canada, le conseil ne comprend aucun représentant du monde des médias ou de la culture. Ainsi, il est, de toute évidence, uniquement constitué d’amis du parti au pouvoir. Permettez-moi de voir ici, une très grande faille au niveau de l’«indépendance» de Radio-Canada, que notre gouvernement démocratique serait sensé respecter et protéger. Lorsque Harper dit que Radio-Canada emploi une quantité importante de gens ayant «horreur des valeurs conservatrices», après avoir annoncé des coupures excessives dans le télédiffuseur, qui menacent fortement son existence, il révèle assez clairement sa recherche de contrôle de pensées, son objection à être critiqué, ainsi que sa volonté de désinformer la population afin de gagner en pouvoir.
Enfin, Radio-Canada est cette institution publique, essentielle à notre pays démocratique, qui nous a permis, et permet toujours aujourd’hui de devenir des citoyens autonomes, informés et capables de forger nos propres opinions. Les horribles compressions successives dont elle est victime menacent à la fois sa survivance et notre culture, autant canadienne, francophone que québécoise. Prouvons à Radio-Canada qu’elle nous permet d’être les bons citoyens que nous sommes, et dénonçons activement les mesures drastiques du gouvernement qui vont contre nos droits démocratiques et de liberté d’expression.
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