Partager
Depuis facilement un an, la question d’une augmentation des frais de scolarité était devenue un grand sujet de prédilection pour les politiciens du Québec. Voilà que le 17 mars 2011, Jean Charest annonce dans son nouveau budget, qu’il y aura effectivement des frais de scolarité supplémentaires qui s’ajouteront à ceux déjà établis, et ce, pour le secteur universitaire. Loin d’être un sujet qui laisse indifférent, des débats enflammés se sont entamés et des manifestations publiques eurent lieu. Les étudiants se sentent leurrés par une politique qui ne semblent pas les représenter. On souhaite que les jeunes soient davantage conscientisés par la politique, qu’ils s’y intéressent, mais on ne les écoute pas. N’est-ce pas un peu contradictoire tout cela ?
On nous dit que les coffres des universités sont vides, que certains doivent payer afin de remplir ce trou. Il serait alors d’une évidence frappante que ce devrait être ceux qui utilisent le service, qui se doivent de payer pour ce déficit, soit les étudiants. Mais à quelles fins sont utilisés nos capitaux ? Nous ne le savons pas ! Ou plutôt, on nous le cache ? Plus de 1300 employés du secteur universitaire ont eu droit à des bonus de départ totalisant 62 millions de dollars. Et on vient dire aux étudiants : Allez, payez ! Nous n’avons plus d’argent pour vous éduquer. Quelque chose ne fonctionne pas ici.
Ce grand débat a aussi révélé au grand jour que le recteur de l’Université Laval à Québec a reçu une prime de 100 000$ pour ses bons services. N’est-il justement pas payé pour les services qu’il offre ? C’est son travail pourtant d’offrir de bons services, pourquoi devrait-il avoir un bonus ? Cette prime de 100 000$ représente de trois à quatre années de salaire pour un citoyen de la classe moyenne. Le recteur de McGill gagne 358 000$ par année et celui de Concordia, 350 000$. Un montant de 700 000$ a été donné à l’ancienne rectrice de l’Université Concordia comme indemnité de départ. On dit ensuite que les jeunes d’aujourd’hui sont gourmands lorsqu’il est question d’argent. On dirait bien que les jeunes ne sont pas les seuls à l’être ou alors, certains ont refusé de grandir…
Mais bien sûr, il est question aussi du métier qui suivra l’acquisition d’un diplôme universitaire. Puisqu’apparemment, un étudiant à l’université gagnera assurément plus, lorsqu’il aura terminé ses études, que n’importe quel autre citoyen n’ayant pas été aux études supérieures, il serait de mise d’établir un coût d’éducation supérieur à n’importe quel autre niveau d’étude. Ok, mais faisons une comparaison entre la personne qui s’en va faire un DEP en charpenterie-menuiserie par exemple, et l’autre personne qui s’en va faire un BAC en enseignement au secondaire Pour ce faire, je prendrai en compte les statistiques du site internet Les guides choisir, disponible aussi en livre pour les étudiants désirant trouver différentes options de métier (livres souvent disponibles auprès des conseillers et conseillères en orientation dans les écoles). Donc, pour ce qui est de la première personne, elle fera son DEP en 1350 heures, ce qui représente un DEP de deux ans, ayant même la possibilité de le faire en un an (cette option est possible et souvent choisie). Cette même personne gagnera par la suite un salaire hebdomadaire moyen de 762$. Pour ce qui est de la deuxième personne, son BAC est d’une durée de quatre ans. Elle gagnera ensuite un salaire hebdomadaire moyen de 790$, pour avoir fait deux ou trois ans de plus d’études, additionnés aux nombreux travaux et devoirs hors cours. Il y a une différence minime de 28$ par semaine. Est-ce assez pour compenser le fait que l’étudiant propriétaire d’un diplôme universitaire a deux ans et parfois même trois ans de salaire de moins que celui qui a un DEP ? Est-ce assez pour rembourser une bourse universitaire ? Il faut arrêter de penser que tous ceux qui vont à l’université en ressortent médecins ou dentistes ! Ce ne sont pas tous les étudiants à l’université qui pourront avoir un métier qui leur offre plus de 100 000$ par année pour leur permettre de rembourser leurs dettes facilement.
Résultat ? Certains se priveront d’études supérieures, faute de moyens monétaires. On prend le risque de jeter aux poubelles de grands potentiels, de la main d’œuvre nécessaire, tout cela pour pouvoir continuer de gâter nos recteurs et autres employés hautement rémunérés du secteur universitaire. On castre notre société : on l’empêche d’évoluer à un stade supérieur, vers une situation sociale meilleure. On ignore l’importance d’une société cultivée. Des gens instruits font la richesse d’une société, mais on semble l’oublier. L’éducation est un droit qui, malheureusement, devient de plus en plus coûteux, réduisant son accès aux personnes ayant un revenu modeste. Cela crée et créera, dans les années à venir, des classes sociales qui seront trop distinctes. C’est triste. Et si nous nous mettons dans la tête des dirigeants qui pensent beaucoup en terme de profit, n’ont-ils pas pensé qu’une personne ayant un métier, rapporte davantage à l’État que quelqu’un au salaire minimum, au chômage ou que quelqu’un qui a recours à l’aide sociale? Ne serait-ce pas mieux de payer en faveur de l’espoir, de la persévérance et de l’ambition, plutôt que de payer pour réparer les dégâts qu’auront causé des frais de scolarité trop élevés ? Des dégâts autant sur le plan personnel que collectif. Nous aurons empêché certaines personnes avec de grands potentiels de s’épanouir personnellement en faisant un métier qu’elles aiment et de ce même fait, nous nous serons privés d’une société en majorité cultivée, instruite et développée.
Il y a aussi la question de l’université qui coûte moins cher ici qu’ailleurs au Canada et aux États-Unis. Oui, je suis d’accord, mais les gens d’ailleurs au Canada et aux États-Unis gagnent en moyenne beaucoup plus que les Québécois. Ça revient alors au même. Un médecin du Québec et un médecin des États-Unis n’ont pas le même salaire. Le premier gagne beaucoup moins que le deuxième. Il est donc normal qu’il paie moins pour ses études que le deuxième. C’est logique il me semble.
Bref, Jean Charest et son parti ont la tête enfouie dans le capitalisme total. Gloire aux riches, et les autres, contentez-vous de notre condescendance hypocrite ! Les jeunes, ne lâchez pas l’école, l’éducation est bonne pour vous ! Par contre, voici la facture, il se peut que vous mangiez du Kraft Diner tout au long de vos études, mais n’oubliez pas, l’éducation c’est bon pour vous ! Venez votez, intéressez-vous à nous ! C’est important la politique. Mais ne chialez pas trop, ça pourrait être embarrassant et on peut s’en passer. On dirait un parent qui dit à son enfant : Mais bien sûr que tu peux faire du vélo ! C’est bon pour la santé physique faire du vélo ! Mais ne traverse pas la rue, reste sur le trottoir et ne dépasse pas les extrémités de la maison. On nous donne l’illusion que nous sommes libres, mais le sommes-nous vraiment en réalité ?
Suivez-nousPartager