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J’ai pas de chum. Je ne suis pas sur Tinder et par respect pour le nombre considérable de gens qui sont sur cette application, je ne dirai pas que je trouve ça niaiseux ce que j’en pense. L’amour pour moi, ce n’est pas une compétition, non, c’est plutôt comme se péter le p’tit orteil sur le bord d’une table, ça ne se prévoit pas.

Un jour, les gens se sont mis à s’inquiéter de mon célibat. Depuis ce temps, dans les party de famille ou dans la rue en croisant des amis de mes parents, il y a toujours quelqu’un pour lâcher un «Piiiiiis t’as-tu un p’tit chum?». Je réponds «non», puis je fixe la personne dans les yeux pour être certaine de cultiver le malaise. Pourquoi est-ce si dérangeant que je sois seule? J’catch pas. En plus, si j’étais en couple, on me féliciterait. Mais de quoi? De partager ma salive et mon temps avec une personne? Ridicule.
Je suis tellement découragée de voir tous ces êtres humains en mode «chasseurs de love» autour de moi. Qui leur a dit qu’il fallait à tout prix être deux pour être heureux? Regardez-moi, ne soyez pas gênés, j’ai 20 ans, je suis célibataire et foutument bien. La seule chose qui brime mon bonheur, c’est les gens qui veulent absolument me trouver un chum. Crissez-moi patience! J’m’aime! Je suis bien toute seule! Je n’ai pas besoin d’une personne avec qui dormir en cuillère. J’aime ça prendre toute la place en diagonale dans mon lit double. Je m’aime osti! Traitez-moi de narcissique; je m’en fous parce que moi au moins je suis capable de passer du temps seule avec moi-même sans avoir envie de manger tout le pot de Coaticook au chocolat.
Aujourd’hui, on juge la fille qui dit qu’elle s’aime et on applaudit l’adolescente qui dit «je t’aime» à un gars qu’elle connait depuis trois semaines. C’est totalement normal, vu notre société gaga qui encourage les contes de fées et les fleurs trop chères à la Saint-Valentin. Ark. Oups. S’cusez, j’viens de vomir un peu dans ma bouche.
Dès leur jeune âge, on enseigne subtilement aux enfants que c’est donc beau un couple, que c’est la norme d’avoir un p’tit copain ou une p’tite copine. On leur apprend à aimer l’autre avant de s’aimer eux-mêmes. On leur inflige des images de princesses et de héros parfaits et on ne leur explique même pas que c’est du merveilleux, du fictif, du pas vrai! Évidemment, leurs idoles vivent toutes des histoires d’amour quétaines. Spiderman is in love with Mary Jane, Bella trippe rare sur Edward… La société projette gentiment des images clichées de garçons et de filles débiles avec les yeux plein s d’étoiles pis des oiseaux qui chantent… Mais derrière cette propagande du bonheur, on ne dira jamais aux enfants que ce n’est pas grave s’ils sont célibataires. On ne dira pas qu’être seul, ce n’est pas une honte, mais bien une force. On leur met simplement la pression de devoir trouver l’amour. Let’s go p’tit gars trouve la femme de ta vie, come on c’est facile! Tout le monde le fait à la télé. Comment peut-on aimer quelqu’un d’autre quand on n’est même pas capable de se trouver acceptable soi-même? Savez-vous ce qui arrive quand on ne s’aime pas? On cherche l’amour des autres et après qu’est-ce qu’on fait pour s’en sortir? Rien. On se met à dépendre de notre couple, parce que tout seul on n’est pas capable de se sentir. Alors à toi la matante, l’ami gossant d’la famille, le cousin pouilleux d’la fesse droite de ma voisine, réfléchis comme il faut avant de demander : « Piiiiiiiis t’as-tu quelqu’un dans ta vie? ».
Donc, oui, je suis célibataire, pis oui je suis bien là-dedans, pis non je n’ai pas de maladie. J’ai longtemps cru que j’étais anormale. Ne vous inquiétez pas, moi aussi, j’ai subi le poids lourd de la société. Moi aussi, j’étais obsédée par le couple, je voulais tellement entrer dans les conversations de mes copines qui chialaient contre leurs chums. Leur dire que mon chum aussi pète quand on écoute des films et qu’il se couche toujours sur mes cheveux. Leur dire que son parfum compense et qu’il a des beaux yeux. Mais au lieu de ça, je dors super bien, je n’attends après personne pour écouter des séries, j’ai le temps de relaxer dans les congés fériés au lieu d’avoir un million de party et je n’ai pas besoin de faire mes jambes trop souvent et même jamais. La belle vie quoi.
Je n’ai rien contre l’amour, je ne le fuis pas, je ne lui cours simplement pas après. Je crois à l’amour, j’ai hâte de le vivre, mais je ne pense pas qu’en l’inventant, il sera aussi bon que s’il me frappe comme une table contre mon p’tit orteil. Apprenez donc à vous aimer avant tout.
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Merci Lysanne de secouer nos habitudes de pensée, nos clichés et nos valeurs glissantes… cependant, je dois te signaler qu’en solitaire, entièrement seul, ou à deux ou plusieurs, la Coaticook au chocolat n’est pas le meilleur choix… question de goût évidemment! Sois encore ¨Belle et bête¨, bête qui fait réfléchir bellement!