American beauty, le rêve!

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Morgane Lamothe
Morgane Lamothe

Les apparences sont trompeuses. Tous vivent des moments difficiles. La petite vie parfaite n’existe pas, et c’est ce que Lester comprend. Il comprend que sa vie, il ne l’a jamais vraiment vécue. Qu’il n’avait jamais vraiment EXISTÉ lors de toutes ces années passées. Qu’il nageait dans un univers robotique où tous sentiments s’étaient évanouis. C’est la dépression. Ce néant qui fait que l’on s’endure péniblement et que l’on se demande ce que l’on fait là. Une rencontre inattendue et soudaine, pourtant, change le tout. Il préférera donc enfin vivre à fond, sans barrières, aucune. Vieillissant, il veut donc remonter le temps, se sentir jeune à nouveau, attirer cette jeunesse pleine de vie, vivre des émotions fortes. C’est ici que la petite vie presque paisible des Burnham change radicalement.

Succès américain de la toute fin du XXe siècle (1999), American Beauty est un film réalisé par Sam Mendes et écrit par Alan Bell. Quelques acteurs connus y sont introduits, entre autres Kevin Spacey, dans le rôle de Lester, le père dépressif et Annette Bening, dans le rôle de la mère, Carolyn. Ces acteurs sont intenses, jouent un rôle de personnage ayant quelques problèmes au niveau psychologique. La vie les dépasse.

Cette comédie dramatique reçoit plusieurs prix, entre autres, celui de l’Oscar du meilleur film en 2000.

Un homme approchant la cinquantaine se rend compte qu’il est mort… à l’intérieur. Déprimé. Plus rien ne l’attire, tout l’ennuie, il n’est plus qu’une machine qui répète sans cesse les mêmes mouvements avec un air de fausse joie. Il endure. Il s’endure lui-même, il endure sa femme, sa fille. Sa femme qui le trompe, qui lui fait vivre un enfer, le méprise et sa fille qui se rebelle, qui le déteste.  Qui est-il? Un loser à leurs yeux, et aux siens, même.

Il se sortira pourtant se sa torpeur, trouvera l’inspiration de revisiter sa vie médiocre et puérile grâce à la jeunesse. Grâce à cette fille, cette presque femme belle, séduisante et jeune. L’amie de sa propre fille. Il se redécouvre, se rend compte qu’il a perdu plusieurs années de sa vie à ne pas la vivre et décide de changer cela. Il prend conscience qu’il n’est jamais trop tard pour renverser le cours des choses.

Se prenant en main, il commence à s’entrainer et revit la rébellion de jeune adulte. Le père de famille rendu maintenant adolescent quitte son emploi, en trouve un nouveau dans un fast-food, fume de l’herbe, écoute de la musique trop forte et tient à se faire respecter, pour une fois, dans la maison. Il n’a aucune retenue à dire ce qu’il pense vraiment, à faire ce qu’il veut vraiment, ce qui ne manque pas de déboussoler du tout au tout sa femme. Il devient un nouvel homme qui ne se laisse plus marcher sur les pieds. Un nouvel homme qu’aucune des deux femmes ne voulait rencontrer.

L’ascension, l’évolution psychologique de Lester vers le bonheur se répercute directement sur les autres personnages alentour, soit sa femme et sa fille. Tandis que ce dernier se rapproche de plus en plus à ce qui ressemble au bonheur, se sort de sa dépression, sa femme y entre, creuse son propre malheur, tête première. Plus rien ne va pour elle. Son emploi la fait crouler sous la pression, l’anxiété de réussite, de performance. Elle veut être forte et fière, donner «une image de succès» à tout prix, mais en dedans, elle se sent petite, tout la dépasse. Elle n’a le contrôle sur rien. Ses crises de panique prennent le dessus. Cette idée d’image de perfection la rend folle, l’emmènera à commettre l’adultère, puisqu’elle est attirée vers le succès (ici, c’est plus le succès de Buddy que d’autre chose). Lorsque son mari le découvre, le reste de pouvoir, de fierté qui lui restait s’envole. La honte et l’échec s’emparent d’elle, ses deux grandes peurs.

Sa fille, elle, se détache de lui, l’évite. Il lui fait honte. Elle n’ose plus inviter sa bonne amie à la maison, tant il la dévisage de manière animale, tant il la désire. Elle se rebelle. Elle fume. Elle ne parle plus beaucoup à ses parents, se renfrogne. La seule personne avec laquelle elle s’ouvre, c’est ce voisin. Ce voisin que trop marginal qui réussit à travers tout cela à la faire sourire. Elle se sent spéciale et écoutée, pour une fois. Elle se sent aimée.

Le film traite de plusieurs stéréotypes, entres autres, celui de la fille blonde, populaire, entreprenante, belle, meneuse de claque, etc. (bref, vous voyez le tableau) qui se tient avec, justement, la jeune fille renfermée qui déteste ses parents, qui  se vêt de vieux habits noirs et que personne ne voit, sauf un jeune homme : son double, un être semblable à elle, qui la reflète. Cela dit, il y a aussi celui de l’ancien soldat dur, homophobe, violent, qui, en fait, se trouve à être tout le contraire et celui du père dans la crise du début cinquantaine qui cherche à se montrer qu’il peut toujours être séduisant et désirable auprès des jeunes filles.

Malgré que ce soit de gigantissimes stéréotypes, du type que l’on voit toujours et partout sans cesse, ceux-ci sont néanmoins essentiels au film. Oui un peu beaucoup explicites, mais efficaces, car certains personnages viennent radicalement *casser* l’image, ce moule préfait dans lequel la société vit. Ils viennent modifier ce moule. Celui que tous se sont créé, inconsciemment. L’image toute faite des préjugés en apparence, sans faire l’effort d’aller voir en dessous, de découvrir ce qui s’y cache vraiment, sans creuser. C’est même ce que le personnage principal dit au début : «Look closer». Regardez de plus près, ne vous fiez pas à ces images préfaites. Faites la vôtre, ne prenez pas le moule : il n’est que trop ordinaire.

L’idée de stéréotypes et de moule est tout de même contrebalancée par certains personnages, dont Rickky, le voisin très «weird» à qui personne ne parle.

Rickky est un jeune marginal, reclus de la société. Il est différent. Il voit les choses différemment. Vivant avec une mère atteinte de maladie mentale et un père violent, dur et homophobe, il découvre une façon de voir le monde, la beauté du monde, tel qu’il est. Tout l’émerveille. Tout l’inspire autour de lui. Il sort du moule, sort de la platitude de la vie. Le monde, selon sa pensée, déborde de beauté. Tellement que celui-ci décide de figer tous ces instants sur vidéo, pour être certain de ne rien perdre, de se rappeler de tout. Ce jeune homme poétique, tant dans ses propos que dans ses images[1], filme à longueur de journée tout ce qui le captive, l’émeut : «There’s so much beauty in this world… I feel like I can’t take it».

Ce personnage vient nous rappeler que, malgré la laideur de la société, des moules, du monde, il y a moyen de voir les choses différemment, de s’arrêter un instant et de voir le beau dans les choses les plus minimes, les plus anodines du quotidien. De voir la beauté dans la laideur du monde d’aujourd’hui. Que seulement s’ouvrir les yeux sur toute cette beauté que le monde renferme est assez pour nous faire oublier (pour quelque temps du moins), les côtés plus sombres, moins reluisants qui nous entourent.

Les personnages ont tous un petit côté «je veux bien paraitre», en commençant par la mère. Celle-ci, malgré que rien n’aille dans sa vie, veut à tout prix donner une image de succès, comme dit plus haut. La jeune adolescente, Jane, veut se faire faire une opération mammaire. Son amie, elle, veut paraitre aguicheuse, attirante, confiante, expérimentée avec les garçons, alors qu’elle ne l’est pas. Le père de Rickky veut paraitre hétérosexuel et homophobe… Ce qu’il n’est pas. Il y a toute une question de normes à respecter, d’idéal de paraitre à atteindre. Tous veulent avoir l’air de ce qu’ils ne sont pas. Ils veulent tous être quelqu’un qu’ils ne sont pas. Serait-ce une critique envers la société, comme quoi nous ne nous satisfaisons pas comme nous le sommes? Comme quoi nous ne sommes pas capables d’accepter qui l’on est?

Original, pourtant, autant du point de vue moral que visuel. Quelques plans sont tout simplement splendides, magiques. Les pétales de rose sont souvent exploités, entre autres, lors de scènes érotiques, venant rappeler la splendeur, la sensualité, la douceur. Ils tombent du ciel, noient Lester de leur parfum. Quel rêve!

Il est pourtant curieux que le réalisateur ait porté tant attention aux détails, aux détails surtout sur les scènes entre Lester et la jeune femme. Il y a toujours les pétales lorsque celle-ci est présente et les scènes répétées (mouvements répétés) lors de contacts physiques. Magnifique.

Déjà au tout début, on nous transporte dans l’univers de ces personnages en planant au-dessus de la ville en compagnie dudit Lester. Il nous présente sa petite ville. Il nous présente sa rue. Sa maison. Sa vie.

Ce film est profond et nous amène à réfléchir. À réfléchir sur nous, sur les autres. Nous pensons tous que tout est plus beau chez le voisin, mais ce n’est pas vrai. Look closer.

Rickky l’a compris. Il a regardé de plus près et a vu la misère, autant émotionnelle que psychologique des personnages. Ils sont tous touchés par une part de désespoir, de dépression. Il voit plus loin que les apparences. Plus loin que la société, comment elle nous pousse à être autre que ce que l’on voudrait être, que ce que l’on est vraiment.

Dans ce film, la société est critiquée. Critiquée de manière à nous dire qu’il est complètement irrationnel de toujours vouloir paraitre, sans être. Paraitre à tout prix, même ce que l’on n’est pas. Donner bonne impression. Vouloir plus.

Il critique le fait que l’on n’est pas capable de se contenter de ce que l’on a. De vivre simplement. D’être heureux. Point.

Le film nous fait réfléchir. Réfléchir sur le fait de s’arrêter, un peu. Arrêter la pression qui pèse. Celle de la performance, de l’image. Arrêter d’être ce que l’on n’est pas pour enfin profiter mieux de la vie, de ce qu’elle renferme. De ses splendeurs. Arrêter et profiter… de la vie.

Non. Il nous faut toujours plus, plus, plus.

Bien sûr, il y a aussi une partie morale (plutôt immorale) abordée. La relation entre deux individus d’âges différents (disons ici vieux et jeune). Il est certain qu’un homme, comme une femme, arrivé à un âge fatidique, voudra retrouver sa verve d’antan, voudra attirer à nouveau, voudra tester, disons, ses capacités à charmer, à se faire désirer. L’homme, Lester, est complètement, éperdument épris de la jeune amie de sa progéniture et n’a d’yeux que pour elle. Non seulement la trouve-t-il jolie, mais aussi séduisante et sexy. Ses pensées s’embrouillent pour ne devenir que des montages pornographiques. Il la désire.

Pourtant, malgré le fait qu’il l’ait entre ses mains à la toute fin, son côté moral prend le dessus. Est-il bien de prendre la virginité d’une adolescente frêle ayant toute sa vie devant elle? Elle semble si fragile, si délicate… Il résiste et respire à nouveau. Toute cette énergie qu’il avait mise à vouloir changer pour lui plaire s’envole. Il est redevenu… Lester. Il se sent bien. Il a évité un acte qu’il aurait pu bien regretter.

Ici, il est question de retenue, de réflexion. Oui, aux premiers abords, il est certain que c’est tentant une jolie demoiselle qui s’abandonne ainsi, mais au final, il est quelque peu immoral qu’un homme marié, de surcroit, s’adonne à quelques galipettes avec une jeune femme de cet âge, encore vierge.

Il est beaucoup question d’infidélité, aussi. Il y a le cas de Lester, mais aussi celui de sa femme, Carolyn. La société d’aujourd’hui a beaucoup de difficulté à ne s’en tenir qu’à une seule et unique personne. Elle a besoin d’explorer, d’essayer. De tromper. De blesser. De briser. Il n’y a que le couple nouveau formé par les deux adolescents du film (Jane et Rickky) qui reste fidèle.

Bref, dans un sens, ces personnages totalement fictifs représentent très réalistement la dure réalité, d’une manière tellement vraie, que l’on se sent mal, que l’on sent un certain malaise pendant le visionnement et l’on se demande pourquoi. Parce que c’est vrai. Nous sommes tous victimes de la société, du moule, des stéréotypes. Look closer.

[1] Je parle ici de la scène clé, de la scène la plus célèbre de ce film où nous voyons deux protagonistes (Jane et Rickky) visionner une vidéo portant sur un sac plastique dansant dans les airs.

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