La naissance de la mort… suite poétique de Camille Bérard

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La naissance de la mort

 

Grossesse

Le noir m’enlace de sa caresse rassurante

La chaleur me berce de ses bras de braise

Une douce humidité m’embrasse et me détend

Calme

Tendresse

Bien-être

Un environnement plus parfait que la perfection

Un environnement plus beau que la beauté

Un environnement plus sain que la santé

Telle une chenille, je me prélasse dans ce cocon de douceurs

Je me sens changer, grandir, évoluer

Je me sens aimée

 

Naissance

Non!

On me pousse, me tire, m’expulse, m’extirpe de mon nid de bonté

L’inconnu m’effraie

L’extérieur m’effraie

La lumière m’effraie

Je ne veux pas partir!

Ah! La lumière éblouissante m’aveugle

Un courant d’air froid fait frissonner mes membres

Une symphonie de sons m’assourdit

Lacrimosa

Mes larmes se mélangent au sang qui recouvre mon corps et le liquide visqueux se répand sur le sol

Je ne connais pas ce toucher rugueux qui viole ma peau

Je ne connais pas ce souffle brûlant qui effleure mes paupières

Je ne connais pas cette voix rauque qui me murmure des notes à l’oreille

Je ne connais rien

 

Enfance

Maman, tu sais?

Tes yeux sont tels des bourgeons de marguerite sur le point d’éclore

Tes cheveux sont telles des cascades d’eau sombre qui brillent au soleil

Ta peau est tel le doux sable chaud des plages de Thaïlande

Tu sais?

Ta voix est la mélodie du chant des oiseaux au réveil

Ton sourire est le croissant de lune éclairant le ciel lors d’une nuit noire

Ton amour est le battement de cœur m’accordant la vie

Maman, tu sais?

Tu es plus belle que le reflet des étoiles sur l’océan

Tu es plus tendre que le toucher d’une femme pour son amant

Tu es plus précieuse que le plus dispendieux des trésors

Maman?

Tu es mon printemps

 

Adolescence

Éclaboussure couleur cramoisie

Torrents de fluides gluants

Douleur abdominale

Un homme me saccage les intestins de l’intérieur, les écrase de ses mains, les déchire de ses dents

J’ai faim

Je veux des sels aussi salés que l’eau de l’océan

Je veux des sucres aussi sucrés que des pommes caramélisées

Je veux des gras aussi fondants que la tire d’érable sur la langue

J’en salive jusqu’au coup

Je me sens salace

Des idées obscènes corrompent mon esprit

Des plumes me chatouillent le bas ventre

Un aimant m’attire vers le sexe opposé

Je me perds dans ce dédale de sensations, de désirs et d’émotions

Je me noie dans l’œstrogène

 

Jeune adulte

Le monde s’offre à moi et m’ouvre grand ses bras

Une boule d’énergie loge en mon plexus solaire et m’illumine de l’intérieur, tel un soleil

Le monde aux mille couleurs me paraît s’éclairer d’une lueur dorée : lever du soleil au-dessus d’une eau limpide

La magie pétille dans mes yeux, tels les crépitements d’un feu alimenté par le vent

Mon cœur s’ouvre à l’univers, tel un coquillage découvrant sa perle

Mon corps vibre d’enchantement, telles les cordes d’une harpe au toucher du musicien

Je me sens vivre

C’est le début de l’été

 

Adulte

La sérénité pénètre les pores de ma peau, telle une épaisse couche de crème solaire

Mon pouls m’inspire la mer à son état le plus calme, le plus paisible

Mes pensées sont à la stabilité d’une maison, à la sécurité d’un travail, à l’amour d’une famille

Mon état d’esprit est celui de la baleine qui, en toute quiétude, se laisse bercer par les vagues dans les profondeurs de l’océan

Le soleil est à son point le plus haut dans le ciel

Le phénix est à son jour le plus glorieux

L’été est à son zénith

 

Vieillesse

Les feuilles tombent des branches, tels des êtres perdus se jetant en bas d’un pont

Lentement, elles se teintent des couleurs des pommes, des oranges et des citrons

Elles s’adonnent à une mort ascendante des plus belles

La pluie déferle sur ma peau et enrouille graduellement mes membres

Mes phalanges imitent le son des branches d’arbre que l’on fracture de nos pieds

Le ciel s’obscurcit de jour en jour, telle l’eau empoisonnée par le pétrole

L’humidité prend refuge sous le sol

L’odeur de la terre imprègne mes narines

Je sens l’automne

 

Vieillesse grandissante

S’envolent mes souvenirs, telles des feuilles emportées par la brise

S’envolent mes soupirs, rois chassés de leur empire

S’envole ma sanité que je n’ai pu emprisonner

Le vent cause en moi le bouleversement de mes pensées dans lesquelles je me perds

Il entraîne mon esprit au-delà des sphères de l’univers

Il me prive des reliques de mon passé, me prive des vestiges de mes aimés, me prive de mes mémoires imagées

Il me prive de ma tangibilité

 

Sentir la mort

L’automne se meurt

Grisâtres, les feuilles couvrent le sol, tel un tapis de dépouilles oubliées

Les arbres tendent les bras vers le ciel en espoir de rattraper le soleil qui, depuis longtemps déjà, s’est enfui

Les yeux des vies qui marchent sont vides : des boules de cristal en lesquelles la lumière ne reflète plus

La lune n’existe pas

Les étoiles n’existent pas

Le feu n’existe pas

La peur déchire le ciel

Déchire mon cœur

Déchire mes ailes

Elle déchire mon être qui fait face à son destin, le destin qu’il savait être le sien

 

Mort

Il fait gris

Les nuages couvrent le ciel

La nature semble morte et les oiseaux immortels

L`hiver s`est installé laissant un monde sans lumière, des fruits hors de porter et des sourires éphémères

L`air est froid et le givre se répand

Des souvenirs s`effacent et font place à la démence

Encore et encore, il revient sans cesse : cet hiver rigide qui n`a pas lieu d`être

Entourée par la mort et encerclée de mille corps, j`ai cherché à partir destinée à souffrir

J`ai tendu la main et crié pour de l`aide, mais perdus eux aussi, ils m`ont fait disparaître

Ne suffissent les efforts, je suis née pour périr

Il n`y a que la mort, je suis née pour mourir

Je pleure encore, étouffée par la neige

Épuisée, je m`endors et oublie dans mes rêves

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