Tracas de l’esprit… poèmes de Joey Gagnon

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Tracas de l’esprit

Dépression :

Voilà que tu pars

Pour te créer une autre fable

Une fable pour te sortir de ce monde

Ce monde où tout est bleu

 

Mais ces histoires ne peuvent pas te sauver

Tu es pris avec moi

Jusqu’à ta mort

Et je vais te suivre même dans l’au-delà

 

Tu as beau sauter, sauter, sauter

Pour t’enfuir en l’air

Mais tu finis toujours par retomber

Toujours plus bas, bas, bas

 

Partout où tu vas, je vais être là

Chez ta famille? J’y ai été adopté

Chez tes amis? Je t’ai déjà remplacé

Chez ton amour? Je suis son amant

À l’école? Je suis le directeur

Au travail? Je suis ton patron

Et chez toi? Je suis dans ton lit

Dans ton cœur

Dans ta tête

Dans tes pensées

 

Je suis une arme

Mes cartouches s’appellent tristesse, souffrance, affliction

Et sois certain

Que mon chargeur est infini

 

Tout va bien :

Tout va bien, je ne fais que soupirer

Lorsque je dois parler, je n’exprime qu’un soupir

Lorsque je dois créer, je ne façonne qu’un soupir

Lorsque je dois respirer, je n’expire qu’un soupir

Je ne fais que soupirer

 

Tout va bien, je ne fais que pleurer

Lorsque je suis seul, je ne peux que pleurer

Lorsque je suis avec toi, je ne veux que pleurer

Je ne fais que pleurer

 

Tout va bien, je ne fais que saigner

Lorsque je dois vivre, je n’arrive qu’à saigner

Je ne fais que saigner

 

Tout va bien, je ne fais que mourir

Je ne fais que mourir

 

Marché de la peur :

Cette avenue est remplie à ras bord

De kiosques où chacun vend ses remords

En regardant en l’air vous n’auriez pas tort

De mentionner que les cieux sont morts

 

La lune s’est enfuie, les étoiles se sont cachées

Les nuages donnent l’impression d’avoir été mâchés

Et puis, sans aucune réflexion, recrachés

Sur une toile rabâchée de pétrole séché

 

Ce qui se trouve sous vos pieds, tout comme ce qui est au-dessus de vos têtes

Vous trouble de plus en plus c’est un vrai casse-tête

De boue, de sang et de déchets en tête-à-tête

Qui occupe et emprisonne vos pensées, un vrai serre-tête

 

Les marchands sont tout aussi repoussants

Que les produits à glacer le sang

Qui couvrent leurs étals oppressants

Et vous frissonnez de penser « il y en a plus de deux-cents »

 

Ce que vous voyez dans leurs yeux est tout sauf banal

Leurs regards lancent des lames faites du plus froid et dur métal

Ces armes invisibles mais pourtant létales

Projettent une aura suintante de mal

 

Cette avenue est sans fin

La mort est son seul parfum

Vous finirez défunts

Si vous n’en sortez pas enfin

 

Vous essayez de partir mais réalisez qu’il est trop tard

Car il y a de plus en plus de brouillard

Et chacun de ces bâtards

Fera tout pour vous emprisonner dans ce cauchemar

 

Métropole:

Il doit y avoir une façon de sortir d’ici

De cette cité de la solitude

Habitée que par le désespoir

 

Une bête est enchaînée en son centre

Une bête satyrique, anémique, cadavérique

La personnalisation même de l’agonie

Une bête purulente, violente, annihilante

L’image même de la mort

Elle est la tumeur qui ronge le cœur de cette ville

 

Cette cité débordait de joie

Maintenant n’en découle que la peur

Décoction chimérique

 

Cette bête n’est pas jeune

Elle est des plus archaïques

Elle est là depuis le début, dès l’avènement, la naissance de cette cité

Cachée au plus profond de ses entrailles

Grandissante avec chaque jour qui passe

Pour l’engloutir en entier

 

Nous pouvons tous être touchés par la montée de cette bête

Car elle se trouve en chacun de nous

Nous attaquant sans répit

 

Elle se nourrit de notre bonheur

Elle se réjouit de notre malheur

Elle voit ce que l’on voit

Elle pense ce que l’on pense

Elle fait ce que l’on fait

Car elle est nous

 

Asile:

Les pensées perverses de ton esprit

Qui t’amènent à des centaines de lieux d’ici

Où le temps laisse tomber tous ces pétales sur toi

Et t’a laissé souffrir

Alors que ta chair tourne au noir

 

Tu apprendras à vivre avec tous les déments

Dans cet endroit des plus déjantés

Que l’on ne peut quitter sous aucun prétexte

Et tu te sens béni lorsque tu reçois la visite

De tes seules amies, les araignées qui sortent du plafond

 

Elles te visitent à tous les soirs et chantent pour toi

« Aller, reste, on a vraiment du bon temps ensemble

Si tu crois pouvoir sortir d’ici

Tu feras mieux de t’accrocher

Aller, reste, on a vraiment du bon temps ensemble »

 

À tous les soirs elles chantent

À tous les soirs tu décides de rester

Quand tu commences à douter qu’elles vont venir

Leurs ombres apparaissent sur les murs de ta cellule

Pour te rappeler quelle est ta place

Te souviens-tu de l’homme qui est venu

Du plus profond de ta mémoire

D’une chanson si douce et ancienne

Pour essayer de te délivrer de ce cachot

Et il doit affronter les araignées, geôlières de ton esprit

 

Cet affrontement des plus cruels

Ne laisse qu’un seul vainqueur

Et c’est grâce à leur nombre

Que les arachnides sortiront victorieuses

Et te garderont avec elles

 

Ta captivité sera donc éternelle

Tu commences maintenant à t’endormir

En te réveillant tu auras tout oublié

Mais venu le soir, cette bataille reprendra

Et en attendant ce moment les araignées se préparent

 

Peine cardinale :

Au nord de la ville

On ne trouve aucune âme

Les maisons sont inhabitées

Les magasins sont fermés

Les écoles sont vides

On ne trouve aucune voiture dans les rues

Le ciel est gris

Il laisse tomber une neige cendreuse

Le soleil commence à couler

Il n’y a rien ici, rien en mouvement, rien de vivant

Comme si le temps s’était arrêté

Au sud les mères sont parties

Elles attendent leurs enfants

Partis se battre pour une terre inconnue

Elles remplissent les rues de leurs larmes

Et la chaleur de leurs sanglots

Est la seule chose qui redonne

De la vitalité à cette ville

Personne ne parle

On n’entend que l’angoisse

La peine et la douleur

La douleur de familles déchirées

 

À l’est, la bataille a lieu

Les cieux sont de feu, la terre est remplie de vie

De la vie qui quitte chacun

Le sang qui coule, un engrais des plus efficaces

Ramènera de la vie dans ces lieux

À la fin de cette guerre

Les pères tombent

Les frères tombent

Les fils tombent

Et ceux qui sont encore enfants partiront

Dès qu’ils grandiront

 

À l’ouest, une terre apparaît

Une terre nouvelle, une terre de vie, une terre d’espoir

Mais une terre de violence, une terre de sang, une terre de mort

Lorsque l’Est regagnera vie

Ce sera aux dépens de l’Ouest

Une vie pour une vie

Et les enfants partiront de nouveau

Et les mères pleureront de nouveau

Et les villes se videront de nouveau

Alors que le soleil fait son retour

Et que tout recommence

 

Vitesse de la vie :

Le jeune interprète a raté son coup

Il a tout oublié

Aucun mot ne sort de sa bouche

Il soupire comme l’enfant merveilleux

Lorsqu’il n’a pas ce qu’il veut

Mais ne pleure pas, car tout va bien

Comme dans les films qu’on a vus

Et lorsqu’on arrive à la fin

On peut s’attendre à un happy ending

Un dénouement où tous les fils se lient

Pour rester uni, un seul morceau

Jusqu’à la fin

À la vitesse de la vie

 

Vice :

Rose et Violette sont devant leur fenêtre ouverte

Regardant en bas dans la rue

Où tous tes problèmes se trouvent

Elles te regardent, souriant à ta consternation

Prenant du plaisir à ton déplaisir

Elles éclatent de rire

Lorsqu’elles te voient glisser et atterrir

Sur le sol poisseux

Ta bouche se remplit d’immondices

Ton nez se casse et se vide

Une mélodie de sang, de morve, de croûtes

Qui s’assemblent en une substance

Rouge, jaune, verte

Épaisse, gluante, croustillante

Une symphonie de couleurs et de textures

Qui touche tous les sens

 

En voyant ton trauma

Les femmes partent

Les entendant glousser à tes dépens

Tu restes étendu là

Tes yeux se remplissant de larmes et

Tu regardes en l’air

Même la lune s’amuse en te voyant

Son croissant formant un rictus malveillant

Une grimace troublante et omniprésente

Tu te relèves, repars vers ta maison

Le sourire lunaire te suivant

Jusqu’à ta ruelle

Et tu te couches sous ton toit de carton

Tu te recouvres avec ton papier journal

Et réalise qu’une longue nuit de souffrance t’attend

Et que cette nuit se répéteras

Encore et encore et encore

 

Rose et Violette continueront de se moquer

Jusqu’à ce qu’elles soient flétries

Et qu’elles ne peuvent te présenter

Qu’un sourire vide

Au loin dans la nuit, tu entends les pleurs

Et les cris qui t’accompagnent à tous les soirs

Une berceuse douloureuse et omniprésente

Et tu penses « Je ne suis pas le seul à souffrir »

 

Versa :

Elles se trouvent dans leur chambre commune

Devant leur fenêtre ouverte et elles hument

L’air malsain et maladif de la ville

Elles regardent dans la rue

Inspectent les trottoirs, les magasins

À la recherche d’une chose

Pour distraire leurs esprits avant qu’elles ne retournent au travail

Voitures, touristes, passants

Enfants, parents, aînés

Animaux, déchets, vitres

Elles ne voient rien de nouveau

Rien qui ne sortent de l’ordinaire

Rien qui pourrait leurs apporter la moindre joie

 

La lune est haute, souriante sur la ville

Il reste peu de temps, l’enfer du boulot approche rapidement

Rose s’exclame et pointe

Un homme a fait son apparition

Un homme mince de malnutrition

Un homme vêtu de lambeau

Dos courbé, tête baissée, pieds traînants

Elles ont enfin trouvé plus lamentable et abattu qu’elles

Elles le regardent et le fixent en souriant

Distrait, il tombe

Son nez se brise et se vide de ses fluides

Un flot de jus multicolore

Elles s’écartent de la fenêtre éclatant de rire

Et partent en gloussant

Elles ont réussi à trouver quelque chose pour les distraire

Avant le retour du calvaire

Toc, toc, toc

Il cogne à la porte et entre

Les rires s’arrêtent

Les sourires s’enfuient

Les tremblements commencent

Il les prend et les sépare

Chacune dans une chambre

Rose à la gauche

Violette à la droite

Leurs regards se croisent

Pleins de peur, de tristesse, de haine et de dégoût

Mais aussi de compréhension

L’une pour l’autre car elles savent ce qui les attend

Une autre nuit de « travail » remplie

De pleurs et de douleurs

Violette repense à l’homme de la rue

Regrettant le bonheur qu’elle a puisé de son malheur

Elle se dit « nous ne sommes pas les seules à souffrir »

 

 

Machine Salvatrice:

Je me trouve au pied de la Machine Salvatrice

Sa surface éblouissante reflète tout

La lumière, le ciel, les bâtiments

Et moi

Je me trouve en face de moi

Un double dans la surface

Un double plus puissant et invincible

Mais un double abject et corrompu

Cette machine peut tout sauver

Où tout détruire

Et seul un monstre peut l’activer

Je regarde mon reflet

Fixe mes yeux et cherche

Au plus profond de moi-même

Pour trouver si je suis ce monstre

Durant des heures je regarde mon double

Et je réalise que nous avons échangé de place

Désormais, je suis pris dans la surface reluisante de cette machine

Alors qu’il est dehors

Me souriant

Je le regarde, une réplique parfaite

Et je réalise que depuis le début

Le monstre était moi

Que ce double n’est que la manifestation

De mes plus perverses intentions

Et je réalise alors que le monde est à moi

À moi et à la Machine Salvatrice

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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