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Depuis qu’elle a quitté son trou, elle y retourne à chaque nuit.
Elle se réveille pleine de pluie, jamais le matin.
Elle croit que c’est son sang, mais je ne la crois pas.
Elle a perdu le sens des couleurs.
Cette nuit-là, on croyait l’avoir perdue.
Elle fut retrouvée au fond du trou, par chance.
Le “elle” a cependant un tout autre sens, maintenant.
Je ne me souviens pas de la dernière fois où son être s’accordait au présent.
Son visage est tombé, une identité perdue dans ce dit passé.
Sa langue fut donnée au chat, il ne la redonnera sûrement pas.
Dans tout ça, nul doute qu’elle croit être cassée.
Au fond, c’est sûrement le cas.
Depuis, elle s’enferme dans ses notes.
Oh, notes de musique, elle n’écrit pas. Plus.
L’on dit que la mélodie est une parole en elle-même.
Je suppose que ma chère amie a beaucoup à crier dans son silence.
Lorsque Morphée la bannit, ses cordes hurlent à la mort.
Lorsqu’elle est assise devant le miroir, le bois pleure de dégout.
Lorsque le masque est tourné en ma direction, pourtant, ses notes sont belles.
Je suis le seul qu’il lui reste, j’ai bien peur que ça l’effraie de me repousser.
Pourtant, je ne suis point aveugle à son malheur.
Sourd à ses concertos pour mélancolie.
Je verrais presque ses yeux s’ennuager là-dessous.
C’est bien la seule chose qu’il lui reste.
Elle vous jouera sûrement qu’elle est un échec.
Une créature laide et sans importance.
Un monstre qui ne mérite rien.
Un fragment de ce qu’elle n’est plus.
Pourtant, ma chère amie se sous-estime.
Elle me sous-estime. Elle nous oublie tous.
Elle semble avoir oublié son sacrifice.
Elle n’est point tombée sans raison.
Là où elle oublie, je me souviens.
Là où elle s’effondre, je la soutiens.
Elle est si forte, sans même se l’accorder. Si courageuse.
Malgré ses peurs de tout, elle retomberait dans un trou pour être un héros.
Elle reperdrait son visage disparu.
Elle redonnerait la langue qu’elle n’a plus.
Les flammes dans ses yeux ne brûlent pas du regret.
Elles se noient seulement sous ce qu’elle croit ne plus être.
Chère amie, si je pouvais reconstruire ton passé,
Je le ferais avec mes marteaux et clous.
Chaque petite parcelle de ton âme.
Je les recollerais sur ta peau.
Je ressens ton silence.
Qui me supplie de rester à tes côtés.
Par peur de l’abandon, je ne suis pas idiot.
La solitude te pousse à créer de nouvelles rivières.
Parfois, il est difficile de t’aimer.
Ces moments, toi-même les redoutes.
Les jours de nuit cachent ton soleil, n’est-ce pas?
Ta lune ne se lève pas, même quand les autres peuvent la voir.
Tu crois qu’il est difficile pour moi d’en faire autant.
Lorsque tu as horreur de toi-même.
Tu crois que l’on partage ce même ressentiment.
Comme un repas ou un bon moment.
Pourtant, ma chère, ce que je ressens ne peut être expliqué en mots.
Tu n’auras qu’à jouer du bois que j’ai transformé en violon pour toi.
Tu n’auras qu’à te protéger sous les masques que j’ai créés pour toi.
Tu n’auras qu’à te reposer sous le toit que l’on partage, ensemble.
Ma chère Eosoni, je ne suis pas un héros.
Le tien peut-être, mais je ne sauverai aucune princesse des dragons.
Tu as osé sauver plus petit que toi au dépit de ta vie entière.
Si j’ose dire, le héros dans cette pièce n’a jamais été moi.
Le futur n’est jamais ancré dans la pierre.
Il est parfois bien plus incertain que la pensée de tous et chacun.
La volonté de tous est un lancer de dé à chaque matin.
Saupoudré par les cacophonies du mélange des destins.
Tu te crois perdue au fond d’un trou, même encore aujourd’hui.
Tu te cherches encore entre la terre et le sang, les larmes et la pluie.
Ton destin, tu le crois sombre, si ce n’est existant.
L’éclat de tes yeux fut remplacé par des cœurs de charbon.
Les sorcières ne savent pas que le charbon brûle fort.
Je t’offrirai à nouveau du bois s’il le faut.
Un jour, peut-être, l’on organisera un grand bûcher.
Nous y brûlerons les ombres qui cachent la lune de tes nuits.
Ensemble.
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