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Tête dévissée, je regarde l’étang bleu qui trône là-haut
Piqué par la cime rocailleuse d’une des caboches du monde
Qui perturbe l’infini calme en de milliers de ronds dans l’eau
Ainsi, sculptés par le vent, dérivent les nuages aux formes rondes
L’appel des kilomètres me rend fébrile, je vérifie les lacets de mes souliers
Je crains qu’ils me laissent derrière, qu’ils partent sans moi explorer
La terre que j’ai besoin de sentir sous mes pas, se dévoiler, se délivrer
Des souvenirs sans âge que la mémoire humaine a oubliés
Je m’arme de mon sac, prend d’assaut ce géant endormi
Dont les pieds s’enracinent dans les flancs de la Terre
Et la tête ronfle dans la brume du ciel dont le bleu est adouci
Par le soleil pale de la saison qui s’épanouit à l’aube de l’hiver
Bientôt, un fin voile de sueur recouvre ma peau
Mes bottes martèlent le sol, résonnent lourdement dans mes os
Puis, tombant en rythme, elles prennent le poids d’une plume
De rocher en rocher, par-dessus les ruisseaux, je suis sans enclume
Chaque branche sur mon passage m’effleure d’un encouragement subtil
Dans l’air froid de novembre, alors que mon souffle givre mes cils
Ces flocons microscopiques reflètent la lumière et emprisonnent le paysage
Dans mes yeux qui rêvent de boire le monde au-delà des pages
Je respire profondément l’air de cristal, je hume
Son parfum capiteux et si caractéristiquement boisé
J’ai chaud, mais la brise traître engouffre ses doigts glacés
Sous mes vêtements de polar et soulève une rumeur de rhume
Mon souffle raccourcit, mes poumons crient famine
Mes jambes souffrent, brûlent sous l’effort soutenu
Mais je continue mon périple vers la cime orpheline
Qui me nargue dans son arrogance immobile et têtue
Et enfin, je nage dans une épidémie de ciel, je m’épanouis
Je suis une fleur de victoire, mon esprit s’ouvre en offrande au monde
Mes pensées dansent dans le vent, j’entre dans la ronde
J’ai réussi, j’ai vaincu et je me sens bien, fière, choyée par la vie
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