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Le film Moon, sorti en 2009 et réalisé par Duncan Jones, fils du célèbre chanteur David Bowie, a été présenté pour la première fois au Festival de Sundance. Il a, entre autres, reçu le prix du public et le prix du jury au Festival du film fantastique de Gérardmer en 2010, le prix de British Academy of Film and Television Arts en 2010 et est considéré comme le meilleur film indépendant britannique à la douzième cérémonie des British Independent Film Awards.
Moon, c’est l’histoire de Sam Bell (joué par Sam Rockwell), un homme qui travaille pour la société Lunar, une compagnie qui crée de l’énergie à partir d’hélium 3, une matière seulement récupérable dans la poussière lunaire. Sam a signé un contrat de trois ans et est en charge de la base sur la Lune, avec pour seul compagnon, un robot, GERTY. Seulement, en arrivant vers la fin de son contrat, Sam commence à avoir des hallucinations et à un moment, lorsqu’il conduit un rover sur la Lune, il est déconcentré par l’une d’elles et percute une des machines qui récupère l’hélium 3. Lorsqu’il se réveille à la base, GERTY lui apprend qu’il a fait un accident, dont Sam ne se rappelle pas, et lui dit qu’il ne peut pas sortir. Sam trouve la chose louche et ne veut pas rester enfermé, donc, il trouve un moyen de contrecarrer les ordres de GERTY, et sort de la base. Il retrouve le rover avec lequel il a fait un accident, mais il y a une personne à l’intérieur : lui-même. Après avoir ramené son sosie inconscient, l’ordinateur leur confirme qu’ils sont tous les deux Sam Bell, et donc à partir de ce moment, les deux hommes essaient de comprendre ce qui se passe. Ils assument automatiquement qu’ils sont des clones et à force de recherches, découvrent, entre autres, un niveau sous leur base où sont stockés des centaines de clones de Sam. Ils ne sont pas les premiers Sam et sûrement pas l’original. Sam n’est donc que le lointain clone d’un original disparu depuis des lustres. Le problème, c’est qu’une équipe de la Terre arrive bientôt, car ils ne savent pas que le « vieux » Sam est vivant et n’est plus dans le rover, ils le croient mort, car GERTY ne les a pas informés pour protéger Sam. Les deux Sam savent que si les hommes arrivent et voient les deux, c’est leur fin. Le nouveau Sam offre donc de prendre sa place dans le rover, et au « vieux », de le renvoyer sur la Terre, puisqu’il a déjà fait ses trois ans. Pourtant le « vieux » Sam commence à dépérir à vue d’œil, la fin de son contrat annonce en même temps sa « date d’expiration ». Ce sera donc le nouveau Sam qui se rendra sur la terre à la fin du film et le vieux Sam qui retournera dans le rover et y mourra.
À première vue, c’est un film compliqué, c’est de la science fiction, donc il y a beaucoup de choses à penser et à noter en même temps. Il y a énormément de détails, et c’est le genre de film qu’on regarde deux fois. Et on ne le fera pas avec ennui parce qu’il est vraiment captivant. C’est, entre autres, grâce à la performance époustouflante de Sam Rockwell. La manière dont il interprète les deux Sam est parfaite et on croirait que ce sont deux acteurs différents qui jouent le rôle, deux personnes complètement différentes. En fait, c’est le cas puisque le « vieux » Sam a acquis une certaine maturité et de la patience alors que le nouveau Sam est impulsif et parfois même agressif. Et Sam Rockwell les joue à merveille. On sent la confiance chez l’un et la nonchalance chez l’autre. La posture, les tons de voix, la manière de marcher sont tous différents. Sa performance lui vaut grandement une bonne main d’applaudissement.
De plus, on explore de nombreux thèmes dans ce film, mais on le fait souvent d’une manière nouvelle. Par exemple, habituellement, lorsqu’on met en scène des clones, il est souvent suggéré une certaine annihilation de la population qui en découle, un contrôle sur les gens, mais ici ce n’est pas le cas. C’est seulement pour rendre plus effectif le travail et ne pas avoir à entraîner de nouveaux travailleurs. Est-ce que la méthode est morale? Probablement pas. Par contre, on ne peut questionner la logique derrière les gestes, mais quand même se sentir découragé pour les deux Sam. La manière dont ce thème est traité ne nous fait pas nous questionner à savoir si les recherches technologiques comme le clonage sont acceptables, mais nous propose plutôt des questions philosophiques à savoir qui est le vrai Sam, qui est vraiment Sam en réalité? Qu’es-ce qui fait de nous, nous? C’est donc aussi une belle interrogation sur l’identité.
D’autres thèmes sont développés comme la solitude ainsi que l’ennui, mais la nostalgie également, un certain « mal de la Terre ». Sam a le désir constant de retourner chez lui même si techniquement la Terre n’a jamais vraiment été chez lui; ce ne sont que des souvenirs qui lui ont été implantés dans le cerveau; ce clone n’a jamais vécu sur Terre, même s’il est en soit Sam Bell.
Un autre aspect m’a vraiment fait apprécier cette œuvre et c’est le personnage de GERTY. Ce robot a été très bien fait et très bien pensé. Nous sommes habitués de voir les robots se retourner contre les êtres humains. C’est le cliché habituel; la machine qui se rebelle contre son créateur ou la personne qui le contrôle. Pourtant, ce n’est pas ce qui se passe ici. GERTY aide Sam. Il ne veut que son bien. La faute n’est pas mise sur la machine, elle est mise sur l’homme, sur les employeurs de Sam. Le méchant n’est pas l’ordinateur et ça ma agréablement surprise, car après avoir vu la bande annonce avant de regarder le film, j’étais persuadée que ce serait le cas. Et le but du film n’est pas de vaincre le méchant, c’est de rentrer chez soi.
Enfin, Moon est un film avec beaucoup de matière à analyser, mais qui en vaut la peine. Malgré le petit budget, le réalisateur a réussi à faire une œuvre impressionnante avec seulement un acteur principal et un robot. Ce n’est pas une mince tâche. Il s’agit même d’un hommage au film de science fiction des années soixante et soixante-dix, sans compter que ce film n’est pas indigne de la science fiction littéraire.
Ce n’est pas le film de science fiction cliché habituel où les extra-terrestres vont envahir la terre, et c’est peut-être une des raisons pourquoi il n’a pas été aussi populaire que l’un d’eux, mais je crois qu’il a beaucoup plus à offrir qu’un simple film de batailles galactiques stéréotypées.
JONES Duncan, Moon, 2009, 97 min.
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